mercredi 3 août 2011

Un jour historique


Depuis des mois, les manifestants demandent sans relâche le jugement de
Moubarak et des autres responsables des meurtres commis durant la révolution.


Ce matin en arrivant dans les bureaux de la New Woman Fundation où je fais du bénévolat, je trouve mes nouvelles collègues réunies dans une petite salle devant la télévision. Ce mercredi 3 août marque le début du procès de l’ex-président Hosni Moubarak, de ses fils et d’autres responsables qui comparaissent devant la justice pour meurtres de manifestants et pour corruption.
L’ambiance est électrique, elles attendent toutes avec impatience la première apparition du dictateur depuis son départ du pouvoir en février 2011. Après une heure d’attente, il entre dans la cage grillagée des accusés allongé sur une civière. L’émotion est forte, une des femmes a même les larmes aux yeux. Il faut dire que beaucoup d’Egyptiens n’y croyaient pas, ils doutaient fortement que ce procès aurait réellement lieu. Durant cette première audience, Moubarak et ses fils plaideront non-coupables et le procès sera ajourné.
De retour dans son bureau, ma chef rayonne; elle m’explique que finalement peu importe si le procès traîne à cause de l'état de santé de Moubarak ou même s’il meurt avant la fin du procès. Ce qui compte c’est que le procès ait lieu. « Nous avons de la dignité ! ». «N’importe quel pays civilisé est capable de poursuivre ses dirigeants en justice pour leurs crimes ».  Ceci est en effet une nouveauté qui accompagne la démocratie naissante de ce pays. C’est d’autant plus important qu’il s’agit aussi du premier dirigent déchu du printemps arabe à comparaître devant la justice.  Enfin une victoire pour le peuple égyptien qui n’a jusque là pas vu beaucoup de changements depuis la révolution!

dimanche 10 juillet 2011

Open air Tahrir




En Suisse, arrivent avec l'été les nombreux festivals. Etant donné que je serai loin jusqu'à fin août, je ne pourrai pas prendre part aux festivités. Toutefois, il me restera toujours la possibilité me rabattre sur les événements égyptiens qui bien qu'ayant un but tout à fait différent, prennent une forme assez similaire; place bondée parsemée de stands où l'on peut acheter glaces, jus, popcorn, sandwiches, lunettes, T-shirts, drapeaux, etc... Au centre de la place, la foule s'attroupe autour des diverses scènes d'où sont diffusés musique et discours des militants. Il y a aussi le village de tentes surmonté par un chapiteau de toile blanche destiné à protéger les manifestants du soleil intense qui frappe sur la place. 

Bien sûr, à part les apparences, rien n'est vraiment comparable, les gens qui sont présents sur la place sont pour la plupart des gens qui étaient et sont encore prêts à risquer leur vie pour leur pays. Encore une fois ils se rassemblent pour poursuivre la révolution qui est encore loin d’avoir atteint ses buts. Depuis la chute d'Hosni Moubarak, c'est la première fois que la place reste occupée aussi longtemps, cela fait maintenant trois jours. Ses occupants sont déterminés à y rester jusqu'à ce qu'ils obtiennent des mesures concrètes en réponse à leurs attentes. Les demandes sur lesquelles à peu près tous les mouvements s’entendent sont le jugement des responsables de la répression de janvier et février et des mesures concrètes de réformes.  

Les égyptiens semblent plus civilisés que les festivaliers helvétiques, ils s'organisent spontanément pour ramasser leurs déchets et maintenir la place propre.



vendredi 1 juillet 2011

Un peu de quotidien

Vous avez été plusieurs à me demander quelques images de ma vie de tous les jours. Les voici et j'en ajouterai d'autres bientôt...

Mon salon (quand il est rangé!)

Basboussa, notre petit chat recueilli dans la rue.
"Basboussa" est le nom d'une patisserie locale à base
de semoule. 
Ma chambre


Mona, ma professeur et Mél, ma camarade
 de classe. Sergi, un Espagnol qui étudie
 aussi avec nous n'était pas là le jour de
la photo, comme c'est souvent le cas.
La rue que je traverse tous les jours pour me rendre à mon école depuis le métro. 

mardi 7 juin 2011

El Tanbura

Vous allez finir par croire que je passe mon temps ici à me balader sur Tahrir. Outre mon intérêt, la raison pour laquelle les manifestations occupent autant de place dans ce blog est simplement mon manque d’assiduité. J’ai plein d’autres idées d'articles mais ceux-ci sont plus intemporels, donc je me traîne. Tandis que si je vous parle dans un mois de ce qui s’est passé la semaine dernière, cela n’aura plus beaucoup d’intérêt. Donc aujourd’hui, un peu de culture. Bon, je ne peux quand même pas omettre de dire que le groupe dont je vais vous parler était présent et jouait au cœur des manifestations du début de l’année.
El Tanbura est un collectif de musiciens que j’ai découvert récemment dans une petite salle de concert près de chez moi. Sur leur page internet, ils se décrivent comme étant composé de « musiciens professionnels, chanteurs, pêcheurs (!) et philosophes ». Ils viennent de Port Saïd, ville au débouché méditerranéen du canal de Suez où ils reprennent des chansons folkloriques égyptiennes.
Accompagnés par quatre musiciens et les battements de mains du public, les différents chanteurs se relayaient pour nous faire leur show. Un septuagénaire a épaté par son énergie, son charisme et ses petites danses. Un type à l’allure de camionneur a ébloui les spectateurs avec son déhanché et ses pas de ballerine. Le code vestimentaire reflétait plutôt bien la spontanéité de l’ensemble ; Djellaba, casquettes et Nike se partageaient la scène.

La Simsimiyya, instrument traditionnel égyptien variété de la lyre est l'instrument fétiche de "El tanbura".
A tout moment des gens du public se joignaient à la danse des artistes. Seul bémol; les femmes restées à l'écart comme souvent dans ce monde d'hommes. 

lundi 30 mai 2011

"La révolution n'est pas terminée"

Depuis la révolution, la place Tahrir accueille chaque vendredi de milliers de personnes jugeant que la révolution n'est pas terminée. Le 27 mai, la manifestation était un peu plus que ce qui est devenu un rendez-vous hebdomadaire, les revendications étaient plus concrètes; une nouvelle constitution, le report des élections parlementaires pour laisser plus de temps aux nouveaux partis de s'organiser, le jugement d'Hosni Moubarak et son gouvernement et certains aussi s'opposaient à l'armée accusée de ne pas respecter les droits des citoyens et d'être inefficace. 
Les Egyptiens fidèles à eux-mêmes sont venu nombreux mais avec un peu de retard. Après de la prière du vendredi, vers 13 heures, la place était déjà bien remplie mais le pic a été atteint vers 15 heures. L'ambiance était assez bon enfant et au soulagement de tous (ceux qui étaient sur la place en tout cas...), il n'y a pas eu de violence. 

Ces femmes avaient décidé de manifester assises sur leur chaise à l'ombre d'un des bâtiments encerclant la place...
... contrairement à beaucoup d'autres.

Certains musulmans ont fait leur prière de l'après-midi au coeur de la place afin donner tort aux frères musulmans et aux salafistes accusant les manifestants d'être des athées (ce qui est considéré comme une insulte). 
Contrairement à ce marchant de jus levant le camp, certains manifestants ont veillé toute la nuit. Samedi midi, ils étaient encore une trentaine au milieu du trafic qui avait repris sur la place.

mardi 17 mai 2011

Après deux semaines de cours d'arabe classique, j'ai décidé de changer et d'apprendre le dialecte égyptien. Ainsi je pourrai certainement progresser plus vite car j'aurai l'occasion de pratiquer et d'entendre ce que j'apprends au quotidien. Cela peut paraître un peu bizarre car j'apprends maintenant l'équivalent arabe de ce que le schwizertütsch est à l'allemand. C'est d'ailleurs vraiment comparable ; tout comme le dialecte national, cela fonctionne avec des abréviations et on y trouve quelques mots tirés du français. Finalement, pour moi, l'important pour l'instant est plus de pouvoir communiquer avec les gens que d'être capable de lire les journaux.

lundi 16 mai 2011

Show soufi

Spectacle de danseurs soufis tournoyant aux rythmes de leurs musiciens.

samedi 14 mai 2011

Vendredi 13 mai




Hier, vendredi 13 mai, des milliers d’Egyptiens se sont réunis sur la fameuse place Tahrir. Les raisons de ce rassemblement étaient diverses. Il y avait la volonté de manifester l’unité du peuple égyptien après les violences interconfessionnelles de la semaine passée. Certains voulaient aussi montrer leur soutien aux contestations des autres pays arabes ( Syrie, Yémen et Lybie principalement). Toutefois, le drapeau le plus présent hier était celui de la Palestine. Les manifestants étaient surtout là pour s’élever contre Israël et soutenir la cause palestinienne à l’approche de l’anniversaire de la Nakba (qui signifie catastrophe en arabe) marquant la proclamation de l’Etat d’Israël.





A dix minutes à pied de Tahrir, les Coptes s’étaient rassemblés devant le siège de la télévision nationale pour demander plus de droits et protester contre la discrimination dont ils sont victimes. La manifestation était bien organisée ; des civils en gardaient l’entrée et il fallait présenter un document d’identité pour joindre le mouvement car la peur de nouvelles violences à leur encontre est bien présente. Au cœur du rassemblement, une séparation entre femmes et hommes avait été instaurée.
Si cela peut paraître choquant et étonner de la part des chrétiens, croyez-moi, cela est nécessaire pour permettre aux femmes de manifester elles aussi. Sans cela, une femme se retrouvant au milieu d’une foule trop dense aura toutes les chances se faire « effleurer » voir carrément peloter le derrière… Bienvenue en Egypte!
Je reste un peu confuse après la journée d’hier ; les coptes qui manifestent à part pour leurs droits, les manifestations pro-palestiniennes des Egyptiens alors que rien n’est encore vraiment acquis dans leur propre pays. Il y a eu c’est vrai des appelles à l’unité des Egyptiens mais ce n’est pas ce qui est ressorti principalement ce jour-là.
Il serait toutefois faux de dire que les gens ne se préoccupent pas de ce problème. Au contraire, ils craignent fortement que cela vienne gâcher leur révolution. Lundi 9 mai, environ deux mille personnes de toutes confessions avaient défilé pacifiquement dans le quartier d’Imbaba où s’étaient déroulées les violences du week-end précédant. 

samedi 7 mai 2011

Al-Iskandria



Envie d’échapper à la chaleur et la pollution de la capitale? 
A trois heures de train, Alexandrie est une destination estivale privilégiée des Cairotes. Mon colocataire devant s’y rendre jeudi soir pour une réunion, j’ai décidé de me joindre à lui et son ami et d’aller y passer une partie du week-end. J’ai pu ainsi jeter un coup d’œil à la cité mythique et savourer son air marin. 
C’est un réel plaisir s’y balader le long de la côte et d’observer les familles déguster leur glace ou les jeunes prendre la pose devant la mer. A coté d’eux, d’autres s’amusent à se laisser gicler par les vagues qui viennent s’éclabousser contre les rochers.
J’ai pu aussi me régaler de succulent poisson accompagné des traditionnels mezzé (ensemble de petits plats qui se mangent à l’aide du pain pita).


dimanche 1 mai 2011

premiers jours au Caire

Cela fait maintenant deux jours que je suis arrivée au Caire. J'ai encore de la peine à me prononcer sur cette ville. Il faut dire que je ne l'ai encore que très peu visitée. Ces deux derniers jours ont été remplis par la recherche d'un cocon dans cette mégapole qui n'est pas de tout repos. J'ai finalement arrêté mon choix sur un petit appartement situé au coeur de la ville dans lequel vivent un égyptien et une allemande. Il m'a fallu bien vite oublier les standards de confort européens car les appartements sont souvent défraîchis et meublés kitsch au possible. Mon futur cocon n'échappe d'ailleurs pas à la règle. L'ambiance conviviale qui y régnait m'a toutefois séduite.
Maintenant que je suis également inscrite dans une école, me voilà fin prête pour débuter ma routine cairote.

Pourquoi le Caire ?



En réalité, cela ne faisait pas du tout partie de mes projets, à savoir retourner à Damas pour y apprendre l’arabe. J’ai pourtant dû, après m’y être férocement  accrochée, me résigner à ne pas y aller. Pour l’instant en tout cas ! Etant donné que mon but principal était l’apprentissage de l’arabe, le Caire m’a semblé la meilleure alternative à cette fin.
N’aimant pas les trop grandes villes et surtout le surplus de trafic, je ne sais pas si cela va me plaire et si je pourrai m’y sentir tout à fait bien. Malgré cette réticence, je suis enthousiaste et curieuse à l’idée d’aller vivre au Caire et surtout d’y aller maintenant, d’aller en Egypte alors que son peuple vient d'accomplir l’exploit de mettre fin pacifiquement à une dictature vielle de trente ans.